mercredi 28 juin 2017

Sergueï Prokofiev : sa biographie, son oeuvre

Sergueï Prokofiev, né le 23 avril 1891 à Sontsovka (Empire russe), mort le 5 mars 1953 à Moscou (URSS), est un compositeur russe de musique classique, un pianiste et un chef d'orchestre.

Enfance précoce

Ayant reçu de sa mère, pianiste, les premières notions musicales, Prokofiev montre des dispositions étonnamment précoces pour la composition : à cinq ans les premières mesures d’un Galop indien, pour piano, à neuf-dix ans de petites scènes lyriques, le Géant et Sur les îles désertes.

En 1904, il entre au conservatoire de Saint-Pétersbourg. Prokofiev s’intéresse de bonne heure aux compositeurs contemporains : Debussy, Strauss, Reger et Schönberg, dont il interprète les œuvres lors de ses premiers récitals. Il s’impose rapidement en tant que pianiste, impressionnant ou choquant le public par sa puissance et sa technique.

En 1914, il se présente avec succès au concours Rubinstein de piano, et joue lors de l’épreuve avec orchestre son propre premier Concerto pour piano. Dans cette œuvre (1911-12), ainsi que dans sa 2e Sonate pour piano, son style se précise : goût pour la carrure rythmique et la vigueur de frappe, pour les harmonies âpres et imprévues, et contrastes entre cette force manifestée et un lyrisme élégiaque, parfois douloureux, qui se ressent de la veine mélodique populaire.

Prokofiev écrit son 2e Concerto pour piano, dont l’exécution en 1913 provoque un scandale mémorable. Ce concerto atteint les limites des possibilités physiques du soliste. Cependant, c’est un Prokofiev beaucoup plus fin et intimiste qu’on trouve dans les 10 pièces pour Piano op. 12, preuve que les deux extrêmes constituent à part égale la nature du compositeur.

En 1914, Prokofiev rencontre Diaghilev à Londres ; il espère l’intéresser à un projet d’opéra d’après le Joueur de Dostoïevski, mais Diaghilev lui commande un ballet, Ala et Lolly. La partition déplaît à Diaghilev, qui la refuse. Prokofiev la retravaille et en fait la Suite scythe. Œuvre d’une violence rarement atteinte, parcourue de visions fantasmagoriques, s’achevant sur un terrible crescendo évoquant le lever du soleil.

En 1916-1917, Prokofiev compose dans les genres les plus divers : il achève le Joueur (1917), écrit ses 3e et 4e Sonates pour piano, son 1er concerto pour violon, le cycle des vingt Visions fugitives (1915-1917), qui sont à la musique de leur époque ce que les Préludes de Chopin sont à la musique romantique.

 
Les années d'exil

En mai 1918, il part pour les États-Unis où il s’impose assez rapidement. Il se voit proposer un sujet d’opéra sur l’Amour des trois oranges.

En avril 1920, Prokofiev quitte les États-Unis pour la France. Il entre dans le cercle de Diaghilev, aux côtés de Stravinski, Poulenc, Milhaud, de Falla, Ravel. Le séjour parisien de Prokofiev est marqué par la représentation de Chout (mai 1921). La même année voit naître le 3e Concerto pour piano (commencé en 1917), d’une structure plus rationnelle et d’un dynamisme plus contrôlé que le précédent.

En 1922, Prokofiev s’installe à Ettal dans les Alpes bavaroises, où il travaille à un nouvel opéra, l’Ange de feu, d’après une nouvelle de Valéry Briussov. En même temps, le compositeur continue à donner des concerts dans les capitales occidentales (Londres, Berlin, Bruxelles).

Avec la 2e Symphonie (1924-25), Prokofiev aborde l’esthétique constructiviste, à laquelle Honegger a rendu hommage avec son Pacific 231. Deux ans plus tard, Diaghilev commande à Prokofiev un ballet constructiviste sur le thème des réalisations industrielles et de la nouvelle vie en Union soviétique. C’est le Pas d’acier, créé en 1927 avec des décors de Lakoulov sous la direction de R. Desormière.

Le retour en URSS

Prokofiev est de plus en plus attiré par l’Union soviétique, se sentant étranger aussi bien parmi les Occidentaux que parmi ses compatriotes émigrés, qu’il juge trop passéistes.

Au début de 1927, il fait un premier séjour en U. R. S. S., où il renoue avec ses anciens amis, dont Miaskovski. Toutefois, le Pas d’acier est désapprouvé par les Soviétiques, et considéré comme caricatural. Achevant l’Ange de feu en 1927, Prokofiev entreprend de composer à partir du matériau thématique de l’opéra sa 3e Symphonie. L’année suivante, une nouvelle - et dernière - commande de Diaghilev est à l’origine du ballet le Fils prodigue.

En 1932, le ballet Sur le Borysthène, connaît un retentissant échec à l’Opéra de Paris. Une autre déception est celle du 4e Concerto pour piano (1931), composé, comme le Concerto pour la main gauche de Ravel, à l’intention de Paul Wittgenstein, et refusé par le dédicataire. Le 5e concerto (1931-32), qui s’apparente au 2e et au 3e, connaîtra une meilleure fortune.

Mais c’est en U. R. S. S., dont il n’est pourtant pas encore citoyen, que Prokofiev reçoit, dès 1933, les commandes les plus intéressantes, à commencer par la musique du film de Feinzimmer, Lieutenant Kijé, qui marque son retour à un style plus classique, afin de se mettre à la portée des masses.

En 1936, il écrit pour les enfants Pierre et le loup, tout en élaborant avec le metteur en scène Radlov un grand ballet, Roméo et Juliette, son premier ballet soviétique, et sa première grande référence à un thème de la littérature classique. Le ballet donne lieu, outre à trois Suites symphoniques, à une série de pièces pour piano.

En 1937, Prokofiev se voit confirmer la citoyenneté soviétique. La même année, il achève une Cantate pour le 20e anniversaire de la Révolution qu’il projette depuis plusieurs années.

En décembre 1939, pour le soixantième anniversaire de Staline, il écrit la cantate Zdravitsa (« bonne santé »). La même année, il compose son premier opéra soviétique, Siméon Kotko, inspiré de la guerre civile en Ukraine. En même temps, il commence à travailler à trois nouvelles Sonates pour piano (nos 6, 7 et 8, dites « les Sonates de guerre »), œuvres monumentales qui constituent le sommet de sa production pianistique.

Dès le début des hostilités germano-russes, Prokofiev est évacué au Caucase et au Kazakhstan, avec nombre d’autres artistes et intellectuels. Les œuvres les plus marquantes de cette période sont la Ballade du garçon resté inconnu, le 2e Quatuor écrit sur des thèmes kabardes, la Sonate pour piano et flûte, qui frappe par sa limpidité, aux côtés d’œuvres pathétiques et tourmentées. Mais, surtout, Prokofiev va, dès 1942, retravailler avec Eisenstein pour un nouveau film historique, Ivan le Terrible. Le premier épisode, projeté en 1945, obtient le prix Staline, mais le second est interdit par la censure.

Les années 1945-1947 voient l’achèvement et la création de plusieurs œuvres ébauchées au cours des années précédentes : la 5e Symphonie, le ballet Cendrillon (théâtre Bolchoï, novembre 1945), la première partie de Guerre et Paix (Leningrad, théâtre Maly, juin 1946). Il compose en 1947 sa 9e et dernière Sonate.

 
Ses dernières oeuvres

Malgré un état de santé précaire, Prokofiev consacre toute son énergie à la composition. En 1950, il écrit la Garde de la Paix. Ses dernières oeuvres importantes sont la Sonate pour piano et violoncelle, écrite pour Rostropovitch, la 7e Symphonie, et surtout le ballet la Fleur de pierre.

C'est à Moscou que Prokofiev meurt le 5 mars 1953. Mais sa mort passe pratiquement inaperçue, car elle survient le même jour que celle de Staline.

Excepté la musique religieuse, Prokofiev a abordé tous les genres. Il a donné le meilleur de lui-même dans la musique pour piano (ses concertos, sonates et ses nombreuses miniatures sont au premier rang du répertoire pianistique du XXe siècle), dans les oeuvres chorégraphiques et cinématographiques, où il excelle à donner l'équivalent musical des mouvements et des scènes visuelles.

Sa musique lyrique présente plus d'inégalités, en dépit de la puissance incontestable du Joueur ou de l'Ange de feu, et de certains épisodes de Siméon Kotko et de Guerre et Paix : Prokofiev est incomparablement plus novateur dans le domaine harmonique et instrumental que dans celui de l'écriture vocale. Réaliste, volontaire, tourné vers le concret et vers l'avenir, caustique et dur, spirituel et provocateur, Prokofiev n'en est pas moins, à côté de cela, un lyrique, qui a toujours su adapter son invention mélodique aux divers styles qu'il a pratiqués.
 
Source : Extraits - Dictionnaire de la Musique - Larousse
Claude A. BECK
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